lundi 22 mars 2010

Surdité et autisme électoral

Je n’ai pas regardé la soirée électorale hier soir. Y avait Marseille – Lyon en football, et c’était drôlement mieux. Mais ce matin, entendu l’inestimable Xavier Bertrand à la radio, interviewé par JM Aphatie. C’était, de la part du premier secrétaire de l’UMP, consternant.

« Je n’ai pas eu le sentiment que nous ayons tourné le dos ni à nos valeurs, ni à nos fondamentaux, ni à nos électeurs… ». Soit Xavier Bertrand n’a rien compris au film, ce qui est grave. Soit il fait semblant de n’avoir rien compris au film, et c’est grave aussi…
Le parti unique de la droite fait 36%, c’est un score risible et misérable. Je ne parle pas de l’abstention, immense et qui n’est pas non plus à mettre au crédit de la majorité actuelle. Malgré la gifle de la semaine dernière, bien que certaines têtes soient sonnées à droite, le responsable du parti présidentiel nous ressort ses infâmes « éléments de langage », remplis de mauvaise foi et de langue de bois.

Hier, après les dépouillements, j’ai discuté avec pas mal d’élus cantonaux de droite, parfois même encartés à l’UMP. Ils sont furieux non pas du résultat, qu’ils trouvent comme moi « logique » et « mérité ». Mais de la manière dont les valeurs de la droite républicaine (pas forcément sarkozyste) ont été bafouées. Parce que malgré le sentiment de Xavier Bertrand, elles ont été bafouées…
Les valeurs « travail » et « mérite », par exemple, ont volé en éclat ces derniers mois. J’avais indiqué sur mon blog que l’affaire Jean Sarkozy marquait le début de quelque chose. Ca n’a pas loupé. Ensuite, l’affaire Proglio n’a rien arrangé. Effets désastreux dans cet électorat de droite populaire, celui de la France qui se bouge le cul qui voit que là haut, une Albanel peut rebondir sans honte sur un joli poste chez Orange…
Et quand je lis ce matin le billet d'Authueil, que l'on ne peut accuser d'être un gauchiste convaincu, cela montre bien le désarroi de l'électorat de droite traditionnel...

Pour ces personnes proches de la droite, le constat est sans appel : Sarkozy est responsable de la défaite. Et en allant plus loin, ceux qu’il a mis en place et qui ont distillé ce discours entre les deux tours le sont également. Je partage leur avis.

Xavier Bertrand et ceux qui trustent les sunlights en ce moment à l’UMP, les Frédéric Lefebvre (qui risque d’être récompensé d’un secrétariat d’Etat) ou ce jeune insupportable Benjamin Lancar, ont oublié un truc bête. Dans l’UMP de Chirac et Juppé, il y avait un « P ». Ce « P », ça veut dire populaire.
Benjamin Lancar d’ailleurs, se veut le président des « Jeunes Populaires ». Populaire, on croit rêver… Pour les électeurs de droite provinciaux et ruraux, les bêtises type Lipdub avec les jeunes fils à papa qui se dandinent avec leur pull en cachemire, ça ne fait pas très « populaire ». Les gosses brushing qui donnent des leçons à la terre entière, et dont le seul effort a été de suivre les études dans la grande école choisie et financée par papa maman, ça fait pas très « populaire ».
Avoir mis ces personnes là en avant, ça a donné un effet désastreux auprès d’un électoral de droite « populaire », au sens noble du terme… Pour ses gens là, la France n’est pas uniquement Neuilly ou les jolis quartiers de Paris…

Alors autisme politique, oui. Xavier Bertrand continuait ce matin à montrer que décidément la droite au pouvoir n’avait rien, mais alors rien compris…
« On s’aperçoit que les français n’ont pas dit non aux réformes ». La phrase est belle, là encore elle ne veut rien dire. Les réformes, quelle réforme ? Le bouclier fiscal, qui se révèle être jour après jour une vaste bêtise, qui donne ce terrible symbole que les plus fortunés ne verront jamais leurs impôts augmenter, alors que la classe moyenne qui trime oui ? La Taxe carbone, ce truc injuste et inefficace qui ne sort d’on ne sait où ?
Et là encore, autisme politique total. Le pouvoir en place s’est pris une gifle, mais les français « n’ont pas dit non aux réformes ».

Je continue à penser aujourd’hui encore que ces élections sont moins une victoire de la gauche qu’une défaite de la droite sarkozyste, moins une adhésion à la néo gauche plurielle qu’un rejet massif de Nicolas Sarkozy et sa politique. Soit dit en passant, on remarque que les urnes représentent une manière bien plus pertinente de contester qu’un No Sarkozy Day, autre émanation de cette « LOL Politique » qui n’a pas que des bons cotés…
Pour autant, je ne veux pas minimiser ce qui, de fait, représente une victoire de la gauche. Si la droite au pouvoir continue à ignorer et à snober cette France « moyenne » et populaire, dont je fais parti, la néo gauche plurielle aura une immense carte à jouer en 2012.

Et si l’alternative que pourrait proposer un rassemblement de cette droite (et centre) non sarkozyste, qui pourrait être représentée par des Villepin, Juppé, Dupont Aignan, Bayrou, Barouin, etc… n’arrive pas à voir le jouer, l’alternance sera à gauche. Et la personne de droite que je suis n’aura pas à en être malheureux.

Aujourd’hui, la défaite de la droite ne me rend pas triste. Considérant cet autisme électoral dont fait preuve l’UMP officiel aujourd’hui encore, j’en serai presque content… Attendons demain, pour voir…

21 commentaires:

  1. Belle analyse ! Bon courage !

    (à gauche aussi, on a du boulot, compte des Ségolistes qui sont repassés à la charge, hier soir).

    RépondreSupprimer
  2. Bonjour, si le gouvernement actuel continues sur sa lancée sans rien comprendre au film, c'est clair que la gauche a une carte à jouer en 2012 et pour cela elle devra se rassembler.
    Je fais parti des déçus de l'UMP. Me concernant je suis de ceux qui considèrent que Sarkozy est le responsable de cette débâcle. 100% d'accord avec vous lorsque vous dîtes que l'UMP s'est coupé de son électorat populaire avec leur conn.... "neuillystes".
    En politique c'est comme dans le business, la concurrence ça a du bon, j'attend donc impatiemment que des langues se délient et s'affranchissent de leur clause de non concurrence Sarko-UMP-ienne.

    RépondreSupprimer
  3. Nicolas,
    Oui bon courage aussi... Heureusement que Malvy a été mieux élu que ROyal, sinon peuchère... ^___^

    Vlad, bonjour,
    Rien à rajouter à votre billet. Nous sommes pareil. A la différence peut être que je n'ai jamais cru à l'UMP (j'ai toujours pensé que la droite était plurielle, davantage que la gauche encore).
    Mais oui, la France n'est pas Neuilly, et ça parait évident que Lancar ou Lefebvre sont de jolis erreurs de casting...

    Bonne journée à tous

    RépondreSupprimer
  4. Sourdité ? Sourdité ? Et pourquoi pas "sourditude" pendant que vous y êtes ? Ou ôtisme, même ? Ségolène, sors de ce corps !

    RépondreSupprimer
  5. Sacré joli coup de gueule :-)

    (Même si notre analyse politique reste divergente)

    RépondreSupprimer
  6. Didier,
    Des fois j'ai honte de moi (merci)

    Claudio,
    Divergente où ? (merci pour le compliment)

    RépondreSupprimer
  7. Ne serait-il pas temps de chercher un successeur à NS ? aller ne Besson pas les bras...aspi

    RépondreSupprimer
  8. Aspi, le jeu de mots est brillant :-)

    RépondreSupprimer
  9. C'est vrai que la droite s'est pris une raclée mais croire qu'on a donné pour autant une caresse à la gauche serait probablement une erreur: les compteurs sont remis à zéro!

    RépondreSupprimer
  10. Le seul entendre les mots de "droite", "gauche" et même "centre" me stimule une poussée d'urticaire.

    Je fais la différence entre les personnes et les idéologies (qui continuent à exister, sous couvert de pragmatisme et justice, ça dépend du côté). Je respecte des gens qui se disent de droite, comme toi, ou de gauche, comme Yann ou Nicolas. Mais je suis convaincu, peut-être à tort mais c'est mon avis, que vous vous trompez.

    Droite et gauche sont des catégories trop partielles (et parfois anachroniques) pour offrir des réponses au monde d'aujourd'hui

    Ai-je été passablement compréhensible ?

    :-)

    RépondreSupprimer
  11. Claudio,

    Chacun s'imagine être à part mais il y a bien des raisons. Le clivage est réel. Mais c'est parce que l'UMP prend de l'hégémonie qu'elle ne permet plus de voir qu'il y a plusieurs droites et le PS n'a jamais été aussi fort que quand ses alliés traditionnels sont forts.

    Mais on ne se trompe pas dans notre positionnement.

    Mais c'est le but d'un centriste : tenter de faire travailler des gens ensemble. Mais ça n'est pas possible.

    Une des clés de la politique est le "partage" (du travail, des richesses, ...) et la manière de voir un problème en global (la "masse de travail" ou "de richesses" disponibles). Il y a bien un affrontement "droite gauche".

    RépondreSupprimer
  12. Nicolas, rien à rajouter

    Claudio, il y a des valeurs qui transcendent les clivages, tu as raison. Maintenant, des clivages y en a, aussi au sein de la "droite" dans son ensemble, et de la "gauche".

    Après, on se trompe peut être... Malheureusement, je ne suis pas convaincu d'avoir raison, hein ;)

    Hermes,
    Tout à fait !

    RépondreSupprimer
  13. Nicolas, je ne suis pas "centriste" et j'assume mon altérité au sein de mon parti.

    J'ai compris que tu y crois sincèrement à la pertinence de ce clivage. C'est pour ça que je te respecte. Mais je reste de mon idée : l'espace politique est orphelin d'idéologies pertinentes. L'affrontement droite gauche, résiduel au vue de l'abstention, ne résiste que par manque d'alternatives crédibles et pertinentes.

    Personnellement, j'y travaille. En toute (ne ris pas) modestie.

    RépondreSupprimer
  14. Salut à toi,

    Le résultat de dimanche, tout le monde (à part ump???) s'en doutait, vu la tournure du 1er tour. La réaction de l'appareil UMP aussi, tout comme il a été dans le déni à l'issu du 1er tour. Visiblement X. Bertrand est plus optu qu'optu et j'ai retenu comme toi cette phrase qui m'a, hélas, fait beaucoup rire : « On s’aperçoit que les français n’ont pas dit non aux réformes »... typiquement la phrase qui ne veut rien dire, qui repose sur rien, qui n'est justifiée en rien et qui ne trouve sa justification dans rien. La gauche a su très bien lui retourner dans les dents que le bouclier fiscal, les cadeaux faits aux banques sont des erreurs manifestent que les français ne veulent pas, mais à priori, ça ne passe pas le "filtre" umpiste.
    Bref, une élection qui ne changera en rien la politique gouvernementale actuelle et qui, au final, est plus déprimante qu'autre chose.

    Ps : est-ce que les ministres battus vont rendre leur ministère? Ca serait vraiment marrant si c'était le cas.

    Bien le bonjour par chez toi

    RépondreSupprimer
  15. Pecky,
    ON parle de Christophe Bechu, un bébé Sarkozy séchement battu en Pays de Loire, et récompensé d'un ministère. Alors tu sais...

    Non, ils sont nuls et affligeants... Pas une bonne nouvelle pour personne finalement, même pas pour la gauche...

    RépondreSupprimer
  16. Claudio,

    Il n'est pas résiduel ! Il n'est pas très important pour une élection régionale (ou, plutôt, ne parait pas important) mais quand il faut une politique globale (ou nationale), il est bien là. 80% des électeurs, voire 90%, pourraient se dire de droite ou de gauche.

    Concrètement, on a une réforme des retraites à préparer. Pour la gauche, l'enjeu sera un élargissement de l'assiette des cotisations alors que pour la droite, il sera l'allongement de la durée du travail (assorti à différentes sauces). La solution retenue sera peut-être un compromis, parce que la vie est faites de compromis...

    Ca n'est qu'un exemple, hein ! Je ne veux pas décaler le débat vers les retraites.

    Mais quand Ségolène Royal demandait le doublement du budget de la justice (dans son programme), c'est bien une idée de gauche même si elle parait à chacun de bon sens (quand on voit les difficultés des tribunaux et des prisons). Par contre, quand elle demande que les délinquants soient mis dans des structures encadrées par des militaires, ce n'est pas une idée de gauche et c'est probablement à cause de ce genre de connerie qu'elle a perdu parce que ça démobilise un type de gauche, comme moi, de penser qu'un jeune puisse être encadré par autre chose qu'un éducateur...

    Je ne sais pas ce qu'en pense un type de droite !

    RépondreSupprimer
  17. Bon ... faudra vraiment que je monte à la Comète un de ces 4 ... les discours sérieux se font mieux avec un verre à la main ;-)

    RépondreSupprimer
  18. Claudio,

    Oui.

    Mais n'oublie pas le résultat des urnes.

    Bayrou a fait 18% parce que des gens de gauche ne voulaient pas de Ségo et des gens de droite ne voulaient de Nico. Pas parce qu'ils croient à une nouvelle voix. Sinon, le Modem n'aurait pas fait 4% dimanche 14.

    RépondreSupprimer
  19. "Mes" électeurs me disent juste l'inverse ... qu'ils ne comprennent pas ce que le MoDem veut et que "centre" ça ne veut rien dire pour eux. Il veulent comprendre en quoi voter MoDem est différent de l'UMP ou du PS.

    Ce que, au bout du compte, c'est bien normal ...

    RépondreSupprimer
  20. Je suis presque d'accord avec l'idée que c'est plutôt la droite qui a perdu que la gauche a gagné. Sans le ras-le-bol du sarkozisme, les divisions dans l'opposition ne jouaient pas en sa faveur. Mais à l'arrivée, la gauche l'emporte tout de même, et cela lui rend une crédibilité perdue dont je me réjoui.

    RépondreSupprimer
  21. Et j'avais pas lu ce billet...

    Mr le Faucon, si ça peut te rassurer je ne pense pas que la plupart des gens qui ont voté PS ont eu l'impression de gagner qqchose.

    RépondreSupprimer

Bienvenue dans ma maison.

Ici, Le respect qui accompagne la critique et le débat est le bienvenu. Insulte ou attaque personnelle (sur moi ou autres) non. Et il est interdit de venir casser les couilles du taulier que je suis (et des autres commentateurs).

Anonymes, passe ton chemin.
Tu peux t'inscrire avec un compte Blogger ou en t'inscrivant à plein d'endroit... C'est bien de savoir avec qui on discute...