J’ai beaucoup apprécié le
constat très dur de Jean-Pierre Raffarin sur les cinq
erreurs majeures de Nicolas Sarkozy pendant la campagne présidentielle.
Enfin une voix à droite qui donne un éclairage franc et clair sur les fautes de
la droite, qui a mine de rien offert tous les pouvoirs (tous) à la gauche.
Il se trouve que je
partage grandement l’analyse
de Jean-Pierre Raffarin : j’ai modestement exprimé mon avis depuis
2009 sur cette dérive qui, pour moi ne pouvait amener que la perte du pouvoir,
et l’éloignement de la droite avec son électorat (et plus généralement avec
ceux qui votent… et quand ceux qui votent s’éloignent de toi, tu as beaucoup
plus de mal à être élu..)
Voilà ce que Raffarin considère être les 5 fautes de Nicolas
Sarkozy.
Il n'a pas osé changer de premier ministre à l'automne 2010, ce qui lui aurait permis "d'enclencher une dynamique nouvelle".
Lorsque François Fillon a été reconduit en automne 2010,
j’étais plutôt
satisfait. Avec le recul, il est clair que j’ai fait une dramatique erreur
d’analyse.
La « dynamique nouvelle » aurait-elle été
néanmoins suffisante ? Sans doute oui si elle avait permis un recentrage,
et de mettre en avant des gens sérieux. Laisser la parole à des Copé, des
Guéant, des Morano, des Dati ou des Hortefeux était une hérésie.
Maintenant à cette époque-là, Michelle
Alliot-Marie était toujours poids lourds du gouvernement. Et lorsque Claude
Guéant est arrivé ministre de l’intérieur, cela pouvait annoncer quelque chose
de positif. On a vu la suite…
Il a perdu le centre par une stratégie de droitisation démarrée en juillet 2010 avec le discours de Grenoble, exacerbée entre les deux tours de la présidentielle. L'exacerbation des tensions a tué l'idée même de rassemblement inhérente à la fonction présidentielle.
N’en déplaise à « la vraie droite » (ou celle qui
se considère comme telle), je pense que cette analyse est assez juste.
Je pense que les élections présidentielles se gagnent au
centre. L’électorat extrême permet éventuellement de faire la bascule au
premier tour. Mais ensuite, il faut rassembler, au-delà de son propre camp.
Souvent rassembler en donnant l’impression que l’autre est plus diviseur, plus
« dangereux ».
Par exemple, je pense qu’en 2007, l’attitude de Ségolène
Royal a fait que beaucoup se sont réfugiés dans un vote Sarkozy, sans doute
plus rassurant. Y compris à gauche de Sarkozy et de l’UMP.
On peut se moquer de la stratégie de campagne du centre.
Mais force est de constater que peu de voix ont manqué à Nicolas Sarkozy en
2012. Une campagne moins clivante et plus rassembleuse n’aurait pas conduit
Marine Le Pen et le Front National à avoir une attitude pire vis-à-vis de
Sarkozy. Eux qui ont intérêt à ce que la droite républicaine soit la plus
faible possible.
Au final, Nicolas
Sarkozy n’a peut-être rien gagné de plus à sa droite. Il a perdu à sa gauche.
Et Hollande a gagné…
Pour préciser ma pensée, cette dernière n’a rien
d’angélique. Jean-Pierre Raffarin met le discours de Grenoble comme un départ
et un préalable, mais personnellement ce
discours ne m’a jamais choqué ni horrifié. De même que je n’ai jamais été
choqué et outré lorsqu’il promettait de « passer certains quartiers au
karcher ».
Ce qui me choque et
m’outre, c’est cette délinquance insupportable, c’est la violence dans
certains endroits, c’est de voir les hausses des cambriolages dans nos
contrées. C’est de voir hier soir deux
policiers perdre la vie dans une course avec un délinquant, qui aujourd’hui
est un criminel. C’est de voir qu’à côté d’Avignon, ceux sont des
gamines qui volent des bijouteries, quand ceux ne sont pas des petits
cons qui foutre le bordel en centre ville.
Et pour aller plus loin, ce qui m’emmerde, c’est que la
droite au pouvoir (que j’ai en grande partie soutenu) a fait de la parole,
beaucoup de parole. Mais les actes et les faits sont là : les résultats en
matière de lutte contre la délinquance ont été mauvais.
Son exercice solitaire du pouvoir et de la campagne l'a conduit à s'isoler et à s'illusionner sur ses chances de victoire : "Les comités de campagne étaient un salon convivial où le chef exposait sa stratégie et commentait ses performances".
Sans doute. Je n’y étais pas, je n’ai aucun avis sur la
question.
Nicolas Sarkozy a raté le débat télévisé de l'entre-deux-tours en se positionnant comme un challenger, et non comme un président : "Peu de respect pour son adversaire, peu de considération pour ses arguments, peu de distance avec la pression, pas d'humour, pas assez de hauteur, ce débat était un combat bien peu présidentiel".
Je suis totalement d’accord avec Jean-Pierre Raffarin. Et
d’une manière générale, j’ai trouvé que Nicolas
Sarkozy ne s’est pas comporté en président sortant durant la campagne
présidentielle, qu’il a manqué de hauteur et d’une certaine
dignité.
J’avais critiqué « la campagne
à la salaud » de l’UMP. Quelque part, Nicolas Sarkozy s’est mis à ce
niveau-là. Dommage.
Il "a fait cadeau du Sénat" à la gauche par "des investitures sénatoriales absurdes, une réforme territoriale mal portée par le gouvernement, une réforme de la taxe professionnelle improvisée" et "une désinvolture permanente vis-à-vis de la Haute Assemblée".
Je suis totalement d’accord avec Jean-Pierre Raffarin. Il y
a eu, pendant un moment, une période ahurissante durant laquelle les élus
locaux étaient brocardés, voire insultés, par l’UMP officielle et par ses
militants. Une période où ce projet
hallucinant de réforme territoriale rendait l’horizon totalement obscurci
pour ceux qui tenaient les exécutifs locaux. Je ne parle pas de la suppression
de la taxe professionnelle, qui a été menée de manière totalement amateur
et dogmatique.
Expérience personnelle : le vice-président de
communauté de communes que je suis a vécu un mandat où tous les 6 mois les
consignes préfectorales étaient diverses et contradictoires. On a pu continuer
à travailler, mais dans un cadre complètement opaque. C’était du grand
n’importe quoi.
Au final, les
élections sénatoriales ont été perdues. C’était bien marrant pour certains
de prendre les élus locaux pour des cons : la sanction a été radicale.
L’élu local peut être traité de tous les noms. Le mépriser
n’est peut-être pas la meilleure manière de préparer une réélection quand on
est tout en haut à Paris. Et force est de constater que le mépris a été fort,
très fort…
"Si une seule de ces cinq occasions avait été saisie, la victoire eut été possible".
Sans doute. Je ne sais pas. Mais au final François Hollande
a été élu avec une marge assez faible par rapport à ce qu’on aurait pu prédire
plus tôt.
Mais bon, avec des « si » Ségolène Royal aurait
été élue en 2007, j’appellerais ma tante « Tonton » et les lasagnes
seraient avec de l’âne et du cochon. Nous n’en saurons rien.
Par contre, en tant qu’électeur
de droite, je suis assez content que
commence un réel « devoir d’inventaire », avec des points précis
qui peuvent être discutés. Je suis un peu surpris que Jean-Pierre Raffarin ai
ensuite soutenu Jean-François Copé, qui incarne toutes les erreurs de ce que
fut le pire du sarkozysme. Ce n’est qu’un détail.
Mais si la droite républicaine ne montre pas un peu
d’objectivité et de lucidité sur le mandat précédent et ce qui a causé sa
défaite, la reconquête risque de ne pas être pour demain. Je trouverais ça
dommage, et un peu dramatique…
Si ces réflexions peuvent permettre une reconstruction de la
droite républicaine, en vue d’une reconquête du pouvoir, ça m’irait
parfaitement…