Ca fait longtemps que je n’ai pas été taggué. C’est
Nicolas qui propose de réfléchir sur le sujet suivant : «
Un bon président doit il être populaire ? ».
Question qui fait suite à la remarque twittée de
Caréagit : «
suivre l’avis du peuple, ça s’appelle de la démagogie, pas de la politique ». Phrase que je trouve assez peu opportune
(voire prétentieuse), mais surtout fausse. Parce que la
démagogie, ce n’est pas ça. Dixit
Wikipédia :
La démagogie (du grec demos « le peuple » et ago : « conduire ») est une notion politique et rhétorique désignant l'état politique dans lequel les dirigeants mènent le peuple en s'attirant ses faveurs, notamment en utilisant un discours flatteur.
Le discours du démagogue sort du champ du rationnel pour s'adresser aux passions, aux frustrations du peuple. Il recourt en outre à la satisfaction immédiate des souhaits ou des attentes du public ciblé, sans recherche de l'intérêt général mais dans le but de s'attirer la sympathie et de gagner le soutien. (...)
Je coupe, la définition est plus longue. Mais la démagogie, ce n’est pas « suivre l’avis du peuple » pour reprendre la gazouillis initial. La démagogie,
c’est conduire son action politique en agissant dans la seule volonté de s’attirer les faveurs du peuple via un discours flatteur et facile à comprendre et à être acceptée. Suivre les volontés du peuple, ce n’est pas de la démagogie. C’est de la politique.
A contrario,
ne pas suivre l’avis du peuple dont on est issu, s’en moquer et n’en faire qu’à sa tête, ce n’est plus de la politique. Ce n’est pas comme hurlent certains de la dictature, mais c’est une erreur. Parce que
l’élu n’est élu que via la volonté du peuple. Il ne tient sa légitimité que de lui. Certains peuvent se supposer plus intelligent que tout le monde et penser que le peuple est con : souhaitons qu’ils n’aient jamais à exercer le pouvoir…
Nicolas demande si «
un bon président doit être populaire ». Du moment où
il ne tient sa légitimité que du peuple, via l’élection présidentielle au suffrage universel direct
(à laquelle je suis très attachée), je répondrai que
oui.
Avec un bémol : un mandat présidentiel dure 5 ans
(avant 7), et les courbes de popularité sont très fluctuantes : le peuple varie, change d’avis, d’opinion, assez fréquemment. Et comment mesure t’on réellement la popularité ? Aujourd’hui, certains affirment « le président n’est plus populaire, il doit démissionner ! »
(pour voir à sa place leurs amis, mais c’est un autre débat…). Et comment le mesure-t-on vraiment ? En mesurant la taille des cortèges dans la rue ? En écoutant juste ceux qui pensent comme soi ? En regardant des courbes de sondage, que l’on sera les premiers à critiquer s’ils sont défavorables à ceux que l’on soutient ? Ce n’est pas facile à mesurer précisément, une popularité…
Un élu n’est que rarement populaire tout au long de son mandat. Mitterrand, Chirac, Jospin, ont connu des courbes diverses. Une élection parfois triomphante et porteuse de plein d’espoir. Des trous assez violents. Parfois des rebonds, et des nouvelles victoires populaires. Et la chute.
Les 48% qui n’ont pas voté pour le président feront tout pour le rendre « impopulaire », donc la popularité n’est que partielle. Lors des victoires électorales, on voit la joie de la moitié + quelques pourcents, mais pas la tristesse des autres…
Pour moi,
la popularité ne se mesure qu’à l’aune du résultat des urnes. Et à a ce propos, Sarkozy a été en Mai 2007 davantage populaire que Royal. Donc il est davantage légitime. C'est simpliste. Cela changera peut être en 2012. Mais aujourd’hui, même si la grogne est importante, le président est encore président jusqu’à la fin de son mandat.
Et il reste, à mon sens, davantage « populaire »
(ou légitime) qu’une tierce personne qui arriverait au pouvoir via le hurlement de la rue, hors du circuit normal de l’élection démocratique, qui vient du peuple, avec tous les défauts qui en découlent.
Ensuite, revenons au twitt : «
suivre l’avis du peuple, ça s’appelle de la démagogie, pas de la politique ». C’est doublement faux. Mais est ce souhaitable, pour gouverner un pays, de ne « pas suivre l’avis du peuple » ? Il a refusé un
traité constitutionnel européen, et 3 ans plus tard on lui
impose quand même par la force : est ce « de la politique » ? Est-ce de la « démagogie » de respecter le souhait, en l’occurrence le vote, du peuple ? Et est ce mal, de respecter la volonté du peuple ? Je crois que l'inverse est davantage néfaste...
Je me méfie d’une chose :
c’est de ceux qui se prétendent plus intelligent que la majorité. Si on suppose, de ce fait, que le peuple, ou les « gens », sont cons, dans ce cas pourquoi leur demander leurs avis ? Supprimons le droit de vote. Ou accordons le simplement à des gens qui seront jugés suffisamment « intelligent ». Et là encore sur quel critère seront t’ils considérés comme « intelligent », capable d’exercer leur droit de vote ?
Le peuple est imparfait. Ceux qui en sont issus le sont encore fatalement. Mais je préfère encore laisser le pouvoir au peuple, plutôt qu’à quelques uns se supposant plus intelligents… La
démocratie populaire reste encore la meilleure des politiques...
Je ne sais pas si j’ai répondu à la question. Je la trouve finalement assez différente par rapport au twitt initial. D’un coté le terme « démagogie », que l’on ressort comme un totem à chaque fois qu’une opinion ne nous plait pas. D’autres sortent les accusations de
populisme ou de fascisme remarquez… De l’autre la notion de popularité pour l’élu, ici le président. Et au milieu de tout ça, l’affirmation qui consisterait à penser que le peuple est con, et que seuls certains ont la vérité. Et que ces gens là font de la politique, les autres non
(ils sont trop cons)…
Depuis le moment où le tag est parti, j’ai l’impression qu’il a été transmis à bien des gens. Je vais donc ne faire suivre personne, ils ont déjà du être questionnés. Mais tout le monde peut y répondre…