Dans une de mes discussions avec
Nicolas, j’avais mis en
avant une notion flou mais que j’aime bien. On parle beaucoup du
« travailler
plus » (qui me met mal à l’aise, et souvent défendu par mon camps
politique) ou
du « travailler moins » (parfois évoqué de
manière caricaturale, Sandrine Rousseau ou un jeune sur CNews qui disait que
travailler ne servait à rien). Des visions de société différentes.
Le « travailler
plus » me rappelle ce que Eric Berne défini dans le « fais des efforts ».
Le « travailler moins », à l’extrême le « travailler plus du
tout », est une ode à la paresse. Mais qui veut dire que le « fais
toi plaisir » sera financé par d’autres.
Y a un an j’ai vécu l’enfer au travail. « Travailler mieux » est en effet une notion flou. Mais le
débat sur les retraites est avant tout un débat sur la « valeur travail ».
Si on peut la considérer comme « valeur ». Je pense que c’est une
obligation car on ne peut pas vivre de manière autonome sans quelques efforts.
Mais le travail ne doit pas être un enfer. L’entreprise ne doit pas être cette « comédie
inhumaine » qui avait fait l’objet d’un livre remarquable.
Le « travailler
mieux » impose déjà de se connaitre. Et de connaitre, et accepter ses
besoins. Certains ont besoin du travail pour se sentir utile, vivant, bien. Ils
sont respectables. Mais ils doivent aussi comprendre que pour d’autre, le
travail n’est pas un but mais un moyen. Un moyen pour vitre, pour être
autonome. Adapter ses exigences vis-à-vis des autres. Le perfectionniste qui
veut que tout le monde soit parfait, vive et dorme « travail », va être
un problème pour lui et les autres.
Le « travailler mieux » implique de fait le « travailler
ensemble ». Et accepter l’autre. Je parle souvent du process PCM qui
permet de se connaitre. J’ai connu un enfer car j’avais un besoin de solitude
et une envie que tout « ne soit pas grave » dans le travail, et j’avais
une N+2 pour qui le travail c’est la vie, pour qui tout était grave et urgent,
et qui m’en demandait toujours plus. La couleur rouge du PCM, l’action. Alors
que j’étais marron jaune. Ça n’a pas marché. Et cette N+2 continue à
mettre des gens en arrêt de travail.
Le management est un
point essentiel du « travailler mieux ». Nous ne pouvons plus
avoir le management d’il y a trente ans. Le management directif, par la
terreur, cela ne peut plus marcher. Cela ne doit plus exister. Si les syndicats
ont un combat à mener, c’est bien celui-là.
Venir au travail la boule au
ventre, avoir envie que la voiture loupe un virage, combien de fois n’ai-je
entendu ces témoignages ? Ils existent. J’avais lu deux ouvrages co-écrit
par des sociologues et des experts du cabinet Technologia « Idées reçues
sur le Burn-Out » et « idées reçues sur le suicide ».
Le « manager
toxique » est également une notion particulière. Mais il existe.
Le lien donne des définitions intéressantes sur le management toxique. Mais
prenons « toxique » au sens littéral du terme : « qui agit
comme un poison ». On peut le voir aussi comme « qui te prend ton
énergie, ton oxygène, pour te rendre du dioxyde de Carbonne ». Un jour, en
me parlant de son lieu de travail, la personne me disait « j’ai l’impression
de travailler dans un garage où un camion benne a tourné à vide toute la nuit… ».
Un endroit toxique, nous sommes loin du « travailler mieux ».
J'ai connu des managers qui étaient des jardiniers. Ils faisaient éclore les belles fleurs, ils faisaient grandir des beaux raisins et ont terminé par produire des magnifiques vins. Tout le monde était gagnant.
« Travailler
mieux », c’est travailler en ayant l’impression d’être utile. C’est un point personnel, mais
je suis convaincu qu’un travail sans sens n’a aucun sens. C’est aux managers et
à la direction de donner un sens au travail du salarié. Pour celui qui est à
son compte, trouver du sens à ce qu’il fait est important.
Cela rejoint une notion qui est arrivée y a quelques temps. « essentiel »
vs « non essentiel ». Travail « télétravaillable » ou « non
télétravaillable ». Quelque part, il a été induit une « importance »
de l’utilité de tel ou tel travailleur. C’est particulier.
Le peu de temps où j’ai été manager, donner du sens à mes équipes était
essentiel. Je pense même que c’était ma tache principale. Un manager n’est pas
un « happyness manager », il n’est pas là pour rendre son équipe
heureuse et organiser des "afterwork" et des parties de baby-foot. Mais déjà, et c’est la loi, il doit « rendre le salarié dans un
état au moins aussi bon qu’il a reçu ». Ne pas dégrader sa santé. Il doit
atteindre des objectifs, et entrainer derrière lui ses équipes. Certains sont
charismatiques, d’autres le font par des coups de fouets. J’essayais de le
faire en expliquant. Convaincre non, mais expliquer, donner du sens.
Là encore, combien de fois n’ai-je entendu des « ça ne
sert à rien ce que je fais… ». Vivre et avoir le sentiment de ne servir à
rien.
Le « travailler mieux » est sans doute un mix de
tout ça. J’avais écrit sur les 4 accords Toltèques, déjà ne pas prendre les
choses trop à cœur (personnellement) et pour soi, faire de son mieux en acceptant de ne pas être
parfait, ça peut aller vers le « travailler mieux ».
Mais aujourd’hui, à l’heure de la démission silencieuse,
pour beaucoup le travail est un moyen et non un but. Déjà accepter cela. Ce n’est
pas remettre en cause la « valeur travail ». Au contraire.
Je pense que je reprendrai ce billet. Je le pose là en
première émission. Mais j’ai envie de discuter sur le « travailler mieux ». Et d'améliorer ce texte. Je suis convaincu que la réforme des retraites n'est rien face à ce défi de revoir le travail. De le repenser.
Pour conclure, j’ai une dernière définition du « travailler mieux ».
Je parlais plus haut de connaitre ses besoins. Mais savoir travailler aussi en mettant une contrainte principale :
quelles sont nos priorités personnelles. Ce soir, on me convoque à deux
jours à Paris jeudi et vendredi 17 février. C’est le soir de mes vacances et
des vacances de nos amis parisiens. Donc non, je n’irai pas. Ma priorité n’est
pas le travail mais ma vie personnelle. Et c’est très bien comme ça.